Cette enews consacrée à la Turquie nous apporte un éclairage important sur la situation économique actuelle du pays. Ceci, tout en faisant un lien avec des éléments structurels ou conjoncturels qui affecteront la participation des entreprises turques à nos salons.
Pour beaucoup de salons des domaines industriel et alimentaire notamment, la Turquie est l’un des tout premiers pays exposant. Sur le SIAL par exemple, c’est le plus gros pavillon du salon.
C’est, de plus, un pays dont le Gouvernement, via différentes structures, soutient massivement le développement à l’export des entreprises, ceci fortement par leurs participations à de nombreux salons en France, en Allemagne, en Chine ou sur d’autres marchés cibles.
Aujourd’hui donc, ce n’est pas tant ce qui se passe en Turquie sur le marché des salons qui nous préoccupe mais plutôt les informations que notre Déléguée, Deniz ŞEN GÜMÜŞ, a pu rassembler sur l’état des entreprises et de l’économie en général, qui aura un impact évident sur la participation de ce pays à nos événements.
À ce jour, plus de deux millions de tests ont été effectués dans le pays. Grâce à ceux-ci, les cas positifs ont été très rapidement détectés, ce qui a permis une guérison rapide et un nombre de décès moindre par rapport aux pays européens (chiffres : 137 000 cas détectés, 94 000 guérisons, 3 600 morts). Durant cette crise, les autorités se sont abstenues de déclarer un couvre-feu total afin de préserver une partie de l’économie des conséquences de la pandémie. Elles considèrent dorénavant que le pic de l’épidémie a été atteint et envisagent une sortie progressive du confinement, afin d’accompagner une relance de l’activité au mois de mai, en prenant les mesures suivantes :
Le pays est entré dans une récession dont il est encore difficile d’anticiper l’ampleur. Le paquet de soutien de l’activité mis en œuvre par le gouvernement turc, dit « bouclier économique », s’élèverait, à ce stade, à 200 Mds TRY (26,4 Mds EUR), soit une somme deux fois plus importante que celle initialement annoncée. Si ce bouclier apporte des réponses aux problèmes de trésorerie des entreprises, notamment aux PME, et, dans une moindre mesure, aux conséquences sociales de la crise, il apparaît peu ambitieux au regard des défis à relever.
Les mesures annoncées visent principalement en effet à apaiser les tensions de trésorerie des entreprises et des ménages (report d’échéances fiscales et d’emprunts par exemple) et à ralentir l’effet de la baisse de la demande dans les secteurs les plus immédiatement touchés par la crise sanitaire (tourisme, transport aérien). La baisse marquée des rentrées en devises (arrêt du tourisme et des IDE) ainsi que l’accélération des sorties de capitaux internationaux limitent la capacité d’intervention des autorités pour soutenir l’activité et défendre la monnaie (qui a perdu environ 15% de sa valeur depuis le début de l’année) et pourraient faire apparaître un risque de besoin de financement non assuré.
Ces mesures de très court terme sont donc insuffisantes et le pays a besoin d’un véritable plan de survie économique à la fois pour soutenir les entreprises dont l’activité, selon les secteurs, a diminué jusqu’à 80% et pour pallier la baisse de revenus des ménages. L’État seul ne pourra sans doute assumer un tel coût. C’est en partie pour cette raison que la Turquie n’a pas mis en œuvre de mesures coercitives pour interdire les déplacements ou arrêter l’activité des entreprises : il n’a tout simplement pas les moyens d’indemniser les employés qui perdraient leurs emplois. C’est sans doute également pour cette raison que le président Erdogan a lancé une campagne nationale de collecte de fonds destinés à venir en aide aux plus démunis, soulignant ainsi les capacités limitées de l’État.
L’exécutif est donc confronté à un dilemme : renforcer les mesures de confinement aurait un impact budgétaire immédiat très important mais retarder leur mise en œuvre impliquerait un coût sanitaire et économique (reprise plus lente, frais de santé plus élevés, etc.) tout aussi, sinon plus, substantiel. Qu’ils soient naturels, économiques, géopolitiques ou sanitaires, les multiples risques auxquels la Turquie est exposée soumettent son économie à de nombreux chocs. Sa capacité à limiter les facteurs de vulnérabilité à long et court termes et, lorsque le choc advient, à l’absorber et s’en remettre rapidement, dépend d’amortisseurs structurels propres au pays.
Les milieux financiers sont toutefois confiants dans la capacité de rebond de l’économie turque. D’abord parce qu’à ce jour, l’exécutif n’a pas mis en œuvre de confinement généralisé ni d’arrêt d’activité des entreprises (hormis celles concernant les secteurs favorisant la convivialité : restaurants, bars, etc.) ; dans ce contexte, environ 50% des employés sont toujours actifs. Ensuite parce que les grandes entreprises ne semblent pas encore trop souffrir du ralentissement de l’économie. À de rares exceptions près, elles disposent encore de liquidités suffisantes.
Enfin parce que l’économie turque a déjà montré, par le passé, ses capacités de résilience et de forts rebonds. In fine, si l’activité aux 2ème et 3ème trimestres 2020 sera en net retrait par rapport aux mêmes trimestres de l’année 2019, une stabilisation peut être attendue au 4ème trimestre. Le pays peut également s’appuyer sur un secteur industriel compétitif et diversifié qui se reflète dans la variété de ses biens exportés : produits industriels de base (métallurgie, pétrochimie), équipements industriels (mécanique, matériel de transport et de construction, électrique et électronique, etc.) et biens de consommation (textile, alimentaire, électroménager automobile, etc.).
Les exportations de services participent également à la diversité des exportations turques et comptent pour environ 7,5% des emplois totaux et 14% des emplois dans le secteur des services. Par ailleurs, la Turquie est très intégrée dans les chaînes de valeurs internationales. Avec une participation en hausse de 8,5% en moyenne, chaque année entre 2005 et 2015 selon l’OMC, l’intégration de la Turquie aux chaînes de valeurs mondiales est l’une des plus importantes parmi les principales économies émergentes et devrait se poursuivre, portée par une productivité en hausse.
Le pays s’appuie, par ailleurs, sur une production agricole qui lui assure une autosuffisance croissante sur un large spectre de produits (limitant ainsi son exposition aux chocs climatiques et aux fluctuations des prix internationaux) et un secteur de la construction très présent sur les marchés internationaux (en 2018, quarante-six groupes de construction turcs figuraient dans la liste des « World’s Top 250 International Contractors »).
L’adaptabilité et la flexibilité constituent également une marque du secteur productif turc ; les entreprises turques étant reconnues pour leur capacité d’adaptation au changement et aux besoins de leurs clients.
Selon le vice président de l’association des organisateurs de salons (UFYD), M. Çetin, l’ensemble des grands salons prévus en fevrier, mars et avril (au nombre de 110 dont 25 internationaux) ont été reportés dans le pays pour une perte de plus de 200 millions de dollars. À l’échelle mondiale, ce sont 1 000 salons reportés avoisinant une perte considérable de 100 milliards de dollars. L’impact sur la baisse de l’exportation turque est important. Le secteur des salons, l’un des plus touchés par la pandémie, sera, selon M. Çetin, l’une des locomotives pour la relance du commerce mondial. L’UFYD a déposé une demande au gouvernement turc pour l’obtention d’aides financiers aux organisateurs des salons et une autre à la KOSGEB (cooperative d’aide pour les PMI) en vue d’augmenter l’aide à la participation des exposants et des délégations.